L'essentiel en bref
Le résumé de cet argumentaire est disponible sur la page d'accueil.
Le projet de Condémines ne se limite pas à une immense patinoire de 6'500 places mais couvre une surface de 91'000 m2 de terrains, avec 600 logements pouvant accueillir 1'100 habitants, 1'050 places de parking et 6'600 m2 de commerces.
Les trois bâtiments principaux sont tellement gigantesques que les immeubles existants paraissent tout petits en comparaison.
La campagne de communication pour la Valais Arena est sans précédent sur Sierre. Tous les médias sont touchés et les réseaux sociaux sont inondés d'images et de vidéos. Le problème de ce matraquage publicitaire c'est que ces images sont trompeuses. Par exemples les arbres sur les photomontages font environ 20 m de haut (p.ex. ici) ce qui prendrait des décennies...
Les bâtiments de 10 niveaux sont cachés en arrière-plan avec des personnages placés au premier plan...
La façade de la Valais Arena, image phare du projet, ne peut pas être vue en entier dans la configuration prévue, avec les deux autres bâtiments qui limitent le champ de vision (Mountain District et Atmo Game).
Est-ce qu'il s'agit d'erreurs monumentales des promoteurs ou d'une volonté de tromper les décideurs ?
La structure juridique est relativement complexe, avec plusieurs sociétés anonymes impliquées. La société anonyme, comme son nom l'indique, est complètement opaque. On ne connaît que les administrateurs via le registre du commerce. Le montage est astucieux : les risques sont délimités par chaque société, mais les bénéfices circulent via les participations croisées.
Voici les liens vers le registre du commerce des principales sociétés :
D'autres sociétés sont indirectement concernées :
Ces sociétés sont intimement liées par les personnes qui en sont responsables et par des participations croisées. Ainsi Ice spirit est actionnaire de plusieurs sociétés, Sierre-Valais Sport est actionnaire du HC Sierre, etc.
Cette structure juridique est idéale du point de vue des promoteurs, mais est plus problématique pour la commune. La commune investit des dizaines de millions de francs sans pouvoir exercer aucun contrôle (droit de regard, droit de vote, transparence des actionnaires, garanties sur les promesses faites).
Il existe pourtant plein d'autres manières d'organiser ces structures juridiques (association, fondation, etc.). D'ailleurs la patinoire de Graben a été construite en 1956 par une société coopérative dont la commune était membre.
La patinoire de Graben a une capacité d’environ 3'650 places.
En 2014, une dizaine de membres du Conseil général déposaient une motion pour construire une patinoire de 3'500 places.
Dans le document « Condémines 2030, un nouveau quartier dans la ville, novembre 2018 », la ville présentait une patinoire de 5'000 places. La commune et les partenaires (y.c. le président du HC Sierre) se réjouissaient de ce projet. Pourquoi 6 ans après, le projet est-il passé à 6’500 places ? Est-ce que cette capacité est en phase avec les 2'383 abonnements vendus cette année ?
Dans un article récent du Nouvelliste, Jean-Daniel Epiney estime que «six mille cinq cents spectateurs, c’est un peu surdimensionné aujourd’hui. Il n’y a rien de pire que de jouer dans une patinoire à moitié vide. Je verrais une étape intermédiaire, soit une enceinte de 5000 places extensible à 6500 en cas de besoin.»
D'ailleurs une grande patinoire n'est pas forcément synonyme d'affluence accrue. Le Nouvelliste montre que la fréquentation a nettement baissé depuis la construction de la nouvelle patinoire à Viège.
La capacité requise pour jouer en National League (ex LNA) est de 5'000 places.
Le graphique ci-dessus montre la capacité des patinoires de Suisse. En orange Graben (3’648 places) et en rouge la Valais Arena (6’500 places). C’est plus que la nouvelle patinoire de Viège (5’000), que celle d’Olten (5’400), et c’est proche de celles de Lugano ou de Bâle (6’600 places). Mais Bâle c’est 170'000 habitants, soit 10x la population de Sierre. Qu’est-ce qui justifie un tel écart entre la capacité actuelle et la capacité prévue?
Oui mais c’est la Valais Arena ! Bien, mais alors pourquoi ce sont les contribuables sierrois qui devraient supporter l’essentiel des coûts d’une infrastructure à vocation cantonale ?
En passant, tous les grands projets de patinoires sont soutenus par des banques ou des assurances (Postfinance, Swiss life, Vaudoise, Raiffeisen, etc.).
Les coûts de construction prévus pour les patinoires de la Valais Arena sont hors normes.
Pour la patinoire principale, les coûts prévus sont de 74 millions. C'est environ 55% plus cher que la tendance donnée par les coûts des patinoires récentes (Ambri, Viège et Porrentruy).
La patinoire secondaire est devisée à 15 millions. La patinoire de Rarogne est similaire et a coûté 5 millions de francs, soit 3 fois moins !
L'approche du Haut-Valais est d'ailleurs très intéressante :
La Valais Arena est gigantesque : la partie enterrée fait 80x160 m et la partie hors-sol mesure environ 80x120m avec une hauteur de 23 m au-dessus du terrain naturel.
Le volume hors sol du bâtiment fait donc 2.35 fois le volume de Manor ((80*120*23)/(50*125*15)) ou 6 fois le volume de Graben ((80*120*23)/(3600*10)) ou 11 fois le volume du théâtre les Halles ((80*120*23)/(48*35*12)).
Le grand immeuble à l'Est des terrains de foot actuels a l'air tout petit en comparaison. Son volume est effectivement 14 fois plus petit ((80*120*23)/(12.5*1254)).
Ce projet semble complètement démesuré pour la Ville de Sierre et son intégration architecturale pose problème.
Est-ce qu’une coupe Est-Ouest montrant le bâtiment de la patinoire et le bâtiment existant de la rue de l’Industrie 44 (à l’Est des terrains de foot actuels) est disponible afin de mieux se rendre compte de la taille relative des bâtiments ?
Est-ce que la commune pourrait placer des gabarits de construction aux 4 coins de la patinoire prévue pendant un mois pour que le Conseil général et la population puissent se rendre compte in situ des dimensions prévues ? Les photomontages sont souvent trompeurs en fonction du point de vue...
La patinoire actuelle de Graben mesure 70 x 50m au sol, avec une hauteur de 10 m (hors charpente métallique inversée).
La Valais Arena mesure 23 m de haut, soit l'équivalent d'un immeuble de 9 étages.
Dans le règlement communal des constructions (RCCZ), la hauteur maximale est de 17 m (forte densité), voire 20 m (centre A). Les parcelles environnantes à Condémines sont en moyenne densité (11 à 14 m). Est-ce qu’une patinoire de ces dimensions peut s’intégrer dans ce contexte ?
Le secteur 3 prévoit même une tour de 11 étages...
La carte ci-dessous montre les zones concernées.
A priori on pourrait penser qu'il n'y a pas de problème d'aménagement du territoire puisque la zone dévolue à la patinoire est en zone d'intérêt général. Il y a cependant plusieurs problèmes. D'abord, il n'est pas certain que tous les bâtiments prévus dans le secteur 1 soient conformes à la zone. Par exemple les restaurants, cliniques, bureaux, commerces, divertissement, etc. Ensuite, la vente des terrains du secteur 2 est conditionnée à la réalisation de la patinoire et au changement de zone de ce secteur 2. Une seule opposition sur la patinoire ou sur le changement de zone peut donc faire capoter tout le projet.
Par ailleurs les hauteurs et densités demandées pour le secteur 2 sont sans précédent...
De plus les changements de zones proposés doivent s'intégrer dans la révision en cours du plan d'affectation de zones. Il y a actuellement 37 hectares de zones réservées parce que la zone à bâtir est surdimensionnée...
Le projet prévoit 1'050 places de parc supplémentaires. C’est l’équivalent de 6x le parking de l’Europe (170 places). Chacune de ces places va générer du trafic. Par exemple avec seulement 4 trajets par place de parc, on augmente le trafic de 4'000 véhicules/jour sur la route de Lamberson, ce qui signifie plus de bruit et de bouchons.
Les besoins en stationnement du secteur 1 sont évalués à 400 places pour le weekend et le projet en prévoit 325...
Le trafic sature déjà à l’Ouest de la ville. Le plan directeur du trafic avec les 3 avenues est au point mort. Les bouchons à l’entrée de l’autoroute à l’Ouest sont systématiques.
Par ailleurs l'inévitable adaptation des carrefours sera à la charge de la collectivité.
Les projets d’infrastructures sportives ont aussi un problème d’affluence variable. Vertic-Halle, Alaïa, les remontées mécaniques, les piscines sont tous confrontées à cela : les parkings sont vides à certains moments et insuffisants en cas de forte affluence.
Le stationnement sur place (325 places, dont seulement 100 à disposition pour les spectateurs) n'est pas du tout en phase avec le nombre de places de la patinoire (6'500), et lors des 30 soirs de matchs ça va être le chaos.
Les 400 places de parking de Constellium ne sont pas loin (500 m à vol d'oiseau soit 6 minutes à pied) mais rien ne garantit qu'elles seront libres lors des matchs.
La gare n'est pas loin (800 m soit moins de 10 minutes à pied), mais qui peut venir en train le soir ? Admettons qu'il y ait deux wagons remplis, ça ne fait que 120 spectateurs...
Les grands parkings sont à Rossfeld (Manor, Migros, Coop), à environ 2 km, soit au moins 25 minutes à pied. Rien ne garantit que ces commerces seront d'accord de mettre à disposition leurs parkings à long terme. Et plus personne ne fait ces distances à pied, il faudra donc des navettes. Il faudrait affréter 70 bus de 50 places pour transporter 3'500 spectateurs... Et qui paiera ?
Actuellement lors des soirs de matchs, les supporters parquent n'importe où sur les trottoirs, de la plaine Bellevue à Glarey... C'est ce qui attend les riverains à Condémines.
La ville de Sierre est une petite ville de 17'000 habitants, avec une fortune en forte diminution depuis 2005, une dette en augmentation (70 millions) et des finances fragiles. Sur les 10 dernières années, 8 ont été fortement déficitaires et 2 tout juste à l’équilibre.
Les perspectives ne sont pas favorables :
La ville n’a donc clairement pas les moyens de prendre des risques sur la construction de la patinoire.
La vision sous-jacente au projet présenté est claire : d’énormes dépenses (investissement et fonctionnement) pour de gigantesques infrastructures, une place très large aux promoteurs du secteur privé, une confiance totale dans les spéculateurs du sport de compétition, une foi dans la croissance « verte » et dans le béton.
C’est un choix très marqué, surprenant dans le contexte financier actuel et qui dépasse largement les limites des parcelles concernées tant il aura d’impact sur tous les autres secteurs de la commune.
Les promoteurs prétendent que la construction de ce complexe à 450 millions aura un impact financier restreint sur les finances communales. La réalité est que l'engagement de la commune dépasse les 100 millions de francs.
Le total de l'engagement financier de la commune dépasse les 115 millions, hors imprévus !
Le droit de superficie (DSDP) rapporte à peine plus d'un million sur 20 ans, soit à peine de quoi compenser la perte de la halle Movimax, actuellement utilisée par la voirie.
Par ailleurs il faudra certainement construire de nouvelles salles de classe. Il y a actuellement 1'900 élèves pour 17'000 habitants, ce qui ferait 123 élèves pour 1'100 habitants supplémentaires, soit 5 classes. En première approximation on peut compter 1 million par salle de classe soit 5 millions de francs.
Avec la baisse des impôts décidée par le Grand conseil, une hausse d'impôts au niveau communal est pratiquement inévitable avec ce projet!
Depuis 6 ans, l'incertitude règne sur l'éventuelle subvention cantonale.
La commune avait connaissance de l'existence d'une subvention cantonale depuis au moins 2018. Dans le document « Condémines 2030, un nouveau quartier dans la ville», la commune écrivait : "La participation du Canton, en vertu de la loi sur le sport, peut atteindre au maximum 25 à 30% du coût total."
Le règlement concernant le subventionnement des installations sportives date de décembre 2023. La procédure décrite dans ce règlement (art. 5) est très proche de la pratique pour toutes les autres infrastructures et constructions.
Les projets publics (bains de Géronde, écoles, crèche, parking sous gare, etc.) suivent tous la même procédure : un cahier des charges est établi, puis un concours d'architecture est lancé, un jury pluridisciplinaire sélectionne ensuite le lauréat qui obtient un mandat pour développer le projet. Le projet est ensuite soumis au Conseil général et au Grand conseil le cas échéant (crédit d'engagement) puis mis à l'enquête publique.
Pour la patinoire, la commune a fait des ateliers participatifs, un mandat d'études parallèles, puis a choisi soudainement (sur quels critères?) de s'associer avec des promoteurs privés genevois.
Cette manière de faire ne correspond donc ni à la pratique ni au règlement cantonal. Frédéric Favre, Conseiller d'Etat en charge des sports, l'a d'ailleurs rappelé en septembre en réponse à une question du député Blaise Melly.
Le 20 octobre, Frédéric Favre rétropédale et affirme le contraire dans le Nouvelliste : Patinoire de Sierre: un concours d’architecture n’est pas obligatoire pour obtenir une subvention cantonale. Il ne parle que de la patinoire et d'un maximum de 25% ce qui ferait 22.2 millions (sur 89 millions).
Le reste de la zone sportive (Mountain district et Atmo Game) ne semble donc pas subventionnable (73 millions d'investissement), alors qu'il s'agit selon les promoteurs du "plus grand complexe sportif indoor du Valais".
L'incertitude reste et la commune assume seule le risque de perdre 22 millions de francs de subventions.
La patinoire de Viège a d'ailleurs bénéficié d'une subvention cantonale de seulement 0.5 million de francs.
La promesse d’une participation aux frais de fonctionnement de 1.5 million de francs par an est une promesse contraignante. Cette dépense devient donc liée et donc intouchable par le Conseil général. En cas de nouveau déficit communal (ce qui est hautement probable dans les prochaines années), tous les autres secteurs non liés (autres sports, culture, festivals, etc.) devront se serrer la ceinture et le hockey sera dispensé d’éventuelles mesures d’économie.
Aucun autre acteur sportif ou culturel ne bénéficie d'un tel engagement sur 20 ans.
Par ailleurs il faut ajouter les intérêts de la dette (30 millions à 2% soit 600'000.- par an) à la subvention de 1.5 million, ce qui fait au moins 2.1 millions de francs par année. Cela représente 2.5 fois les charges actuelles de Graben (850'000.- en moyenne).
Le quartier doit en théorie apporter de nouveaux contribuables, mais il y a deux gros bémols.
Le premier est le type de contribuables que le nouveau quartier va attirer. Qui veut habiter dans des immeubles très denses et très hauts en périphérie, avec vue sur les usines d'aluminium d'un côté et la patinoire de l'autre, avec le bruit des usines et de la route de transit ? Certainement pas des contribuables aisés.
Le deuxième bémol est que chaque nouvel habitant génère des charges : les enfants vont à la crèche et à l'école, les nouveaux espaces verts nécessitent plus de personnel aux parcs et jardins, les nouvelles rues doivent être entretenues par la voirie, les déchets doivent être ramassés, les familles utilisent des prestations du CMS, la police régionale doit se renforcer, etc.
Donc dans le meilleur des cas, les nouvelles recettes fiscales sont compensées par les nouvelles charges liées aux habitants. Les promoteurs font des bénéfices en louant ou en vendant les appartements, mais la commune n'en profite pas.
Le projet de patinoire est conditionné à la privatisation de près de 23'000 m2 de terrains (16’960 m2 à 800.- soit 13'568'000.- CHF et 5'888 m2 à 950.- soit 5'593'600.- CHF, pour un total de 19'161'600 CHF).
Aucune collectivité ne vend ainsi ses meilleures parcelles. Les collectivité et caisses de pensions construisent sur ces terrains des immeubles qu’elles louent ensuite (revenus). Ici la proposition est de brader ces terrains aux promoteurs privés pour qu’ils puissent rentabiliser la patinoire. Pourtant le modèle des flux financiers ne montre aucun transfert entre Condémines investissements (qui gère le secteur 2) et Condémines Com qui gère le secteur de la patinoire.
Avec 20'000 m2 de terrains et un indice IBUS de 2.5 les promoteurs peuvent faire des dizaines de millions de francs de gains immobiliers...
D’autres solutions seraient possibles, comme la vente aux enchères ou un DSDP à un tarif du marché. D’ailleurs est-ce légal de vendre en gré-à-gré de telles surfaces à un promoteur, fût-il le promoteur de la patinoire ?
De mémoire, aucun crédit d'engagement n'a été présenté au Conseil général avec de telles incertitudes.
Le montant de l'investissement de la commune n'est pas connu. La décision du Conseil général porte sur un prêt de 30 millions mais élude de nombreux investissements directement liés (adaptation des routes, démolition de Graben, construction d'une nouvelle école, moloks et éclairage public, etc.).
Les frais de fonctionnement ne sont pas connus. Outre la subvention annuelle de 1.5 millions, il faut tenir compte des intérêts de la dette et les autres frais de fonctionnement (entretien des espaces verts et du nouveau quartier).
Les participations du canton et des autres communes ne sont pas connues.
Dans le document « Condémines 2030, un nouveau quartier dans la ville, novembre 2018 », la ville présentait une patinoire d’un coût 35 à 40 millions, avec subvention du canton de 25 à 30% et une participation des communes du district. Comment est-ce possible que le projet soit désormais estimé à 89 millions ?
Viège a construit une patinoire de 5'150 places pour 35.5 millions de francs. Une telle patinoire reviendrait à 25 millions de francs avec la subvention cantonale. La ville pourrait ensuite louer l'infrastructure au HC Sierre, à un tarif adapté selon la ligue dans laquelle le club évolue. Pourquoi la patinoire de Sierre est-elle évaluée à 74 millions ?
Est-ce que la ville a besoin d'une 2e patinoire enterrée à 15 millions de francs ? Est-ce qu'une patinoire comme celle de Vissoie ne serait pas largement suffisante pour le patinage public et les écoles ? Nîmes a par exemple développé un modèle de patinoire très abordable (4 à 6 millions de francs). C'est 3x moins cher que la patinoire prévue.
Pourquoi sur cette infrastructure à vocation régionale, c’est la ville qui supporte l’entier du risque financier (30 millions) ? Pourquoi ne peut-on pas déterminer une clé de répartition ou au moins un engagement ferme des autres collectivités avant l’approbation par le Conseil général, comme cela se fait pour toutes les autres infrastructures intercommunales (cycle d’orientation, STEP, etc.) ?
Pourquoi la ville devrait encore racheter les bâtiments à l'échéance du DSDP, alors qu'elle les a déjà largement payés?
Est-ce que la promesse de 1.5 million par an est indexée à l'inflation ?
Quel est le coût de la déconstruction de la patinoire de Graben ? Pourquoi ce montant n’est-il pas inclus dans les décisions du Conseil général ?
Pourquoi les terrains du secteur 2 ne sont pas vendus aux enchères ? Cela garantirait un prix du marché et non pas un prix convenu d’avance qui défavorise la commune.
Le DSDP correspond à 55'000.- pour 30'068 m2 soit 1.83.-/m2. Ce tarif est tellement bas qu’il correspond à une subvention déguisée.
Le coût d’entretien des espaces verts sera pris en charge par la commune. A quelle charge financière cela correspond-il ? Quelles sont les autres ressources supplémentaires liées à ce projet (l’augmentation de la population va nécessiter plus de personnel au CMS, à la voirie, à la police, au contrôle de l’habitant, à la crèche, etc.) ?
Le total de l'incertitude représente des dizaines de millions de francs et il est incompréhensible que le Conseil général doive se prononcer à ce stade.
Le projet prévoit la construction de 6'600 m2 de surfaces commerciales, soit l'équivalent de 50 commerces de 132 m2 !
Une partie de ces commerces sera fatalement en concurrence avec les autres commerces de Rossfeld ou du centre-ville (p.ex. restaurants, fitness, magasin de sport, etc.).
Il y a déjà des commerces vides, tant à Rossfeld qu'au centre-ville. Le subventionnement direct de ces commerces par la mise à disposition du terrain à prix dérisoire (1.83 CHF/m2) va engendrer une concurrence déloyale avec les autres surfaces commerciales qui ont payé leur terrain au prix du marché.
Avec la structure juridique mise en place, on ne peut pas savoir qui sont les investisseurs. Et les actionnaires peuvent changer sans aucun préavis. Un milliardaire étranger pourrait acquérir les sociétés et changer de cap. Il ne serait pas tenu par les promesses orales faites par les promoteurs actuels.
1875 FINANCE figure parmi les gérants de fortune indépendants les plus importants de Suisse et d’Europe avec plus de 13 milliards d’actifs sous gestion. Est-ce qu'ils ont vraiment besoin de subventions communales pour construire une patinoire ?
Les références du promoteur immobilier genevois Urban project se passent de commentaire...
Chris McSorley et Christophe Stucki, sont les anciens dirigeants du Genève-Servette HC.
Les promoteurs ont engagé Christophe Bonjour (agence immobilière Bonjour Conseils et Immobilier), ancien responsable de Crédit Suisse Valais.
Ces promoteurs ont tous le même profil (actifs dans la finance et l'immobilier principalement à Genève). A priori ils ne viennent pas à Sierre pour ouvrir une oeuvre de charité...
D'ailleurs Condémines Invest SA est déjà propriétaire de plus de 11'000 m2 de terrains au Sud de la route de l'Ancien Sierre, ce qui représente au bas mot 10 millions de francs... Acquérir en catimini des parcelles tout en poussant la commune à un changement de zone avec augmentation des droits à bâtir (IBUS)...
Le championnat suisse de hockey est bien expliqué sur Wikipédia.
En résumé, il y a deux ligues : la National League (anciennement ligue nationale A) au niveau supérieur et la Swiss league (anciennement ligue nationale B) au niveau inférieur.
Le HC Sierre joue en Swiss league.
L'article du Nouvelliste du 10 avril 2023 intitulé «La Valais Arena sera inaugurée face à une équipe de National League» Chris McSorley, instigateur du projet de patinoire à Sierre permet de bien comprendre le raisonnement des promoteurs :
"Quand Chris McSorley, ex-entraîneur de GE-Servette et de Lugano, a une idée en tête, il fonce. En l'occurrence, il a un double projet pour le HC Sierre: doter la ville d'une nouvelle patinoire et d'un projet XXL et permettre au club de retrouver très vite sa place en National League."
"Il faut bien comprendre que le business plan de ce projet dépend de la seule présence du HC Sierre dans l’élite."
Pour comprendre la volonté de passer en National League, il faut analyser le business d'un club de première division...
Le hockey professionnel est un business comme un autre, avec des charges et des revenus.
Les clubs sportifs sont des sociétés anonymes et ne sont pas tenues de publier leurs comptes. La grande majorité des clubs ne le font d'ailleurs pas.
Certaines infos filtrent dans les médias. Par exemple, le HC Ajoie, arrivé dernier de la saison 2023-2024, annonce un budget de 13.8 millions de francs (source : ArcInfo).
Le HC Bienne dispose d'un budget de 18.5 millions (RJB).
Certains clubs publient leurs comptes :
Le HC La Chaux-de-Fonds (HCC) a présenté son dossier de candidature pour la National League sur les mêmes bases qu'en 2022-2023, avec donc un budget de 10 millions de francs (actuellement 5,63 millions). (ArcInfo)
Les charges sont difficilement compressibles. Par exemple les salaires d'une équipe de première division varient actuellement entre 11 et 14 millions de francs par année.
P.ex. pour le LHC : «La majeure partie des clubs de hockey souhaitent instaurer un “salary cap“». «Les revenus que l’on génère chaque année [sont] de l’ordre de 26 millions», dont la plus grande partie vient de la billetterie et sa division LHC Gourmet, en charge de la restauration. Au total, le club emploie une centaine de collaborateurs."
Les sources de revenus sont similaires pour tous les clubs : billetterie, sponsoring, cantines, droits TV, etc.
Il y a plusieurs conditions à remplir. Premièrement il faut remplir tous les critères de la National League dont une patinoire de 5'000 places. Par exemple, la candidature de La Chaux-de-Fonds a été recalée. La construction de la patinoire dépend de nombreuses décisions (commune, canton, etc.) et pourrait prendre 4 à 5 ans au mieux.
Ensuite il faut hisser le club en tête de la Swiss League (Grasshopper, Olten, etc.) et battre le dernier club de National League.
Pour cela il faut passer le budget actuel du HC Sierre de 4.5 millions actuellement à plus de 18 millions d'ici 2030. Le saut est donc colossal et la compétition est rude.
Dans le meilleur des cas le HC Sierre pourrait espérer passer en National League à l'horizon 2030. Chris McSorley a déjà 62 ans...
Certains spécialistes sont assez critiques : Dans le hockey valaisan, les vendeurs de rêves ont remplacé les résultats.
Un stade de glace est l’infrastructure sportive la moins écologique que l’on puisse imaginer, tant à la construction (énergie grise) qu’à l’exploitation (eau et électricité). Dès lors, juxtaposer une patinoire et un écoquartier frise la dissonance cognitive.
Par ailleurs on voit immédiatement que l'écologie n'est utilisée que comme alibi et qu'elle n'a pas été intégrée dans les réflexions. Il n'y a aucun fil conducteur sur les matériaux (locaux, bas carbone), sur l'énergie grise, sur les émissions de CO2, sur la biodiversité ou sur le cycle de l'eau.
Les promoteurs se contentent de coller des labels "Minergie", "SNBS" là où cela les arrange. Pourtant avec 80% de surfaces goudronnées ou bétonnées, il n'y a pas de quoi se vanter...
L'exemple de la deuxième surface de glace est flagrant : alors que c'est une patinoire sans contraintes officielles, elle pourrait être à l'air libre (sans excavations), bénéficier d'une aération naturelle et d'un éclairage naturel, d'une charpente en bois local, etc.). Mais les promoteurs l'ont conçue en béton, enterrée, ventilée et éclairée artificiellement.
Le seul fil conducteur qui permet d'expliquer les choix (nombre de places, volumes, labels, etc.) est la rentabilité financière (rentabilité du HC Sierre, rentabilité du quartier, etc.).
Le projet présenté met en avant des points qui sont des obligations légales :
Par ailleurs le standard Minergie-P (ou CECB A/A) est une exigence pour pouvoir bénéficier du bonus sur l'utilisation du sol visé par les promoteurs (art. 52 LcEne)...
Le concept énergétique est bancal :
SignaTerre n'est pas un bureau spécialisé dans les patinoires. Il existe pourtant des entreprises suisses expérimentées comme Zero-C ou Wettstein...
L'absence d'analyse écologique est flagrante lorsque l'on considère les émissions de CO2 du projet.
Pour la construction on devrait essayer de minimiser la taille des infrastructures, de limiter les excavations, de limiter le béton et de privilégier le bois. Le projet fait tout l'inverse : la patinoire est prévue au maximum de capacité, les bâtiments font la part belle au béton et aux structures métalliques.
En phase d'exploitation les émissions seront principalement dues au trafic induit. La volonté de faire de ce complexe un des plus grands centres de sport indoor de Suisse et d'attirer des visiteurs de loin à la ronde va à l'envers de toute forme de durabilité.
Le cas des excavations est particulièrement éloquent. Le projet prévoit environ 21'000 m2 d'excavations à une profondeur de 5m au moins, soit environ 105'000 m3, auxquels il faut rajouter l'excavation de la colline du pavillon des sports (environ 50x50m sur 2m de haut). Les excavations de la zone 1 représentent donc environ 110'000 m3 soit près de 10'000 camions de terre de 12 m3 !
En quoi la promotion immobilière prévue sur le secteur 2 et secteur Sud peut-elle être qualifiée d’éco-quartier ? Les normes de construction en matière d’énergie sont déjà très contraignantes et le solaire PV est obligatoire sur les bâtiments. Il n’y a aucune information sur l’énergie grise (matériaux de construction), sur les aspects sociaux (mixité sociale, co-création, etc.), sur les aspects économiques…
Le standard SNBS mis en avant par les promoteurs a été sévèrement critiqué dans la revue espazium (revue des architectes SIA) : L'Étang à Vernier: de quoi le label SNBS-Quartier est-il le nom? .
Au-delà des querelles d'experts sur les labels, les photos du quartier de l'Etang à Vernier font plutôt penser à la Cité Aldrin.
Des grands immeubles, du béton, du goudron et des arbres freluquets. Donc après l’écoparc de Daval qui n’a rien d’éco, voici l’écoquartier qui n'a rien d'éco. Le greenwashing devient un standard.
On ne parle même pas du parking en silo qui est prévu...
La commune pourrait porter un vrai projet d’écoquartier participatif, avec construction en bois local, espaces et jardins partagés, une mobilité intégrée (Mobility, etc.)... Les bons exemples ne manquent pas :
La notion d’écoquartier est aussi un peu dépassée et hors sujet ici : à quoi ça sert d’avoir un écoquartier si on n’a plus les moyens de faire des pistes cyclables en dehors de celui-ci? C’est toute la ville qui doit pouvoir bénéficier de progrès (chauffage à distance, bus, services de proximité, etc.). Or la concentration des moyens financiers sur ce secteur va justement à l’encontre de cela...
Si la commune s’intéressait au bilan carbone complet, elle ne ferait pas une patinoire démesurée (qui sera vide 99% des heures de l'année) et une promotion immobilière déguisée en écoquartier, mais une patinoire modeste, hors sol et en bois local...
La nappe phréatique est située à environ 5 m de profondeur sous les terrains de foot.
Le projet prévoit 2 patinoires exactement à ce niveau. Il faudra donc prouver au service de l'environnement que le projet n'aura pas d'impact physico-chimique sur la nappe, ce qui n'est pas simple quand on essaie de refroidir une surface de 10'000 m2 à zéro degrés...
Par ailleurs le projet prévoit le 2e sous-sol du parking principal sous le niveau de la nappe. Sachant qu'il est déjà difficile d'obtenir l'autorisation de faire quelques forages géothermiques à travers la nappe, on peut dire que le projet est mal parti.
Tous les ingrédients sont réunis pour conduire à un conflit juridique majeur. Il y a des enjeux financiers énormes (plusieurs centaines de millions), il y a une forme d'urgence pour les promoteurs à rassurer les investisseurs et à assurer les financements pour la réalisation. Il y a un dossier très complexe qui mêle contrats privés, sociétés multiples, longues procédures (changement d'affectation de zones, autorisations de construire).
Et puis il y a un dossier très enjolivé, rempli de contradictions et de problématiques à régler plus tard. Chaque problème qu'on élude par une phrase rassurante de l'équipe de communication va revenir plus tard et plus fort. Ça va coûter plus cher et prendre plus de temps. Et ça va augmenter la pression, jusqu'à ce qu'un fusible cède.
A la fin ce sera aux tribunaux de dire si le dossier était simplement enjolivé ou volontairement trompeur. Si les promesses étaient réalistes et sincères ou exagérées et de nature à influencer des décisions.
A Genève McSorley est en procès contre son ancien club.
Les élus communaux ne sont pas à l'abri de poursuites pour gestion déloyale des intérêts publics, tant les chiffres divergent et en l'absence des précautions les plus élémentaires.
Un dossier peut aller jusqu'au Tribunal fédéral s'il dispose d'un argument solide. Ici il y a au moins une douzaine de vulnérabilités exploitables :
Sachant qu'une opposition peut faire traîner le dossier pendant 10 ans...
Par ailleurs le bâtiment du Judo Club est dans l'emprise de la patinoire, et à l'heure actuelle aucune solution satisfaisante n'a été trouvée...
Les retards et les surcoûts sont la norme dans ce type de projet pharaoniques. Et les villes qui hébergent ce type d'infrastructure sont systématiquement en première ligne pour éponger les pertes.
Voici quelques extraits d'articles de presse récents :
Ce dernier exemple est particulièrement éloquent, tant l’approche est similaire à celle de Sierre. Genève a suivi cette voie du partenariat public-privé et a connu toutes sortes de déconvenues (audit, confidentialité, confiance, problèmes de personnes, délais, gestion, etc.).
Les risques financiers se poursuivent ensuite lors de l'exploitation :
"Le déficit au budget du Centre sportif de Malley augmente d’environ 700’000 francs pour cette année. Le surcoût sera porté par la Ville de Lausanne. [...] Le CSM explique l'aggravation de son déficit 2024 par l’inflation, une augmentation des coûts de l’énergie de 15% et une hausse des taux de ses emprunts, mais aussi par divers travaux."
Le risque est grand que les nouveaux commerces ne créent pas de nouveaux emplois mais remplacent d'autres commerces du centre ville.
Les grands centres commerciaux ne sont pas à l'abri des difficultés financières. Par exemple le Mall of Switzerland, deuxième plus grand centre commercial de Suisse, construit à Lucerne n'arrive pas à louer ses surfaces commerciales. Harte Zeiten für Shoppingcenter – Krisen-Mall erhält neues Management
Les habitudes d'achat ont profondément évolué depuis le covid et la croissance du commerce en ligne ne faiblit pas.
Rentabiliser des infrastructures sportives reste un défi. "Le Chalet n’a jamais été rentable pour nous, mais c’est une vitrine pour Alaïa. Il fait partie de notre offre quatre saisons et on a la volonté de continuer à l’exploiter." (Source)
Le dossier est rempli de dizaines de promesses : nombre d'emplois, nouveaux habitants, chiffre d'affaires, promotion en National League, nombre d'arbres plantés, labels de qualité, autonomie énergétique, etc.
La plupart de ces promesses sont floues, sans fondement, sans engagement formel et sans moyen de contrôle.
Par exemple les promoteurs s'engagent à planter 350 arbres. Sur 91'000 m2 de terrains cela fait 1 arbre pour 260 m2 ce qui est dérisoire. Par comparaison sur la colline du Petit-Bois, la commune a planté 4'600 arbres et arbustes sur une parcelle de 5'500 m2 (Source).
Qu'est-ce qui se passe si les bâtiments ne sont finalement pas construits au standard Minergie ? Rien. Qu'est-ce qui se passe si l'autonomie énergétique avancée n'est pas atteinte ? Rien.
Rien n'est mis en place pour garantir les engagements. Les promesses n'engagent donc que ceux qui les croient.
Il existe un grand nombre de risques sur un tel projet et le rôle de la commune ne devrait pas se limiter à rassurer les citoyens. La commune devrait identifier de manière systématique les risques et prévoir des mesures défensives ou correctives en conséquence.
Que se passe-t-il en cas de référendum ? Les diverses décisions du conseil général (investissement, frais de fonctionnement et vente de terrains / DSDP) seront-elles liées ?
Que se passe-t-il en cas d’approbation du projet par le législatif, puis d’une opposition de riverains à la patinoire ? Serait-il envisageable que les promoteurs conservent les terrains du secteur 2 / secteur Sud pour la promotion immobilière sans construire la patinoire ?
Est-ce que c’est légal de céder tous ces terrains publics à un promoteur privé sans passer par un appel d’offres ? J’ai voulu acheter une place de parking de 10m2 à la commune il y a quelques années et on m’a répondu que c’était impossible sans passer par un appel d’offres public (enchères publiées au BO). Mais cela serait possible en gré à gré pour 23'000 m2 ? Est-ce que cela constitue un risque juridique ?
Est-ce que les appels d’offre pour tous les mandats liés à ce projet (architectes, ingénieurs, construction, etc.) seront soumis aux marchés publics ? A Genève la patinoire du Trèfle-Blanc a subis des retards en lien avec cette question ...
Qu’est-ce qui se passe en cas de dérive des coûts de construction, ce qui est quasi systématique sur des chantiers de cette ampleur ?
Que se passe-t-il en cas de faillite d’une ou de plusieurs des sociétés ou de retrait des promoteurs ?
Qu’est-ce qui se passe si les sociétés anonymes sont vendues à d’autres promoteurs ?
Quelles sont les mesures de prévention des risques qui ont été prises par la commune pour éviter les problèmes d’Aminona Luxury resort, d’Alaïa, etc. ?
Est-ce que la santé financière des investisseurs privés a été évaluée par un auditeur indépendant ?
Est-ce que toutes les promesses faites sur les posters sont reprises dans des contrats contraignants (label SNBS pour le quartier, engagement de transférer les bénéfices d’une société à l’autre, construction des autres infrastructures de sport et de loisirs, etc.) ?
Est-ce qu’il est envisageable que les promoteurs réalisent la patinoire sans les autres infrastructures sportives en cas de dépassement du budget ?
Vu la taille du projet et les différents éléments qui le composent, quelle est la probabilité que tout soit construit sans opposition et selon les plannings présentés ?